Je vous parlais tout récemment de l'opération épinette.
Cette mission est terminée. Je me suis donc chargée de remplacer les 54 becs de cuir par du Delrin (voir l'article ci-dessous pour les détails de l'opération), tout à la main, avec mes petits doigts de musicienne. Cela m'a pris une quinzaine d'heures, j'ai travaillé jusque 1h du matin plusieurs jours (des jours où je donnais cours jusque 19h45-20h30, en ayant commencé ma journée entre 6h du matin et 9h) - je vous laisse imaginer la tête de zombie au final, mais c'est fait, l'épinette est repartie en état de marche. Du coup, je m'ennuyais un peu. Alors j'ai décidé de refeutrer le chapiteau de mon plus ancien clavecin (17 ans d'existence). En effet, le chapiteau (barre située au dessus des sautereaux) est garni de manière à amortir les impacts de la tête des sautereaux qui viennent buter dessus. Car bois contre bois, tant au niveau de la sensation que du son c'est "un peu" brutal. La garniture peut être en feutre Casimir ou en drap tissé. Le problème est qu'à force d'amortir, la garniture se tasse et s'abîme, et sur mon instrument, on commençait à sentir vraiment une dureté désagréable sous les doigts quand on jouait. En pressant la garniture, on sentait en effet le bois et les agrafes. J'ai donc pris quelques conseils et plutôt que de tout enlever, j'ai acheté de la feutrine noire adhésive de 1mm d'épaisseur, je l'ai découpée en bandes et j'ai collé un certain nombre de bandes (1 seule pour le clavier supérieur, 2 dans l'aigu et 3 pour médium et grave pour le clavier inférieur) directement sur la garniture existante de manière à retrouver de l'amorti et du volume. Prix de l'opération 17 euros (et il me reste de quoi faire une vingtaine de bandes). Le toucher est à nouveau agréable. Après, c'est une retouche de secours que je me permets sur cet instrument, qui bien qu'étant déjà un instrument dit de concert, n'est pas un instrument de qualité supérieure, comme mon Kilström ou mon Kennedy à venir. Si je devais le faire sur ces derniers, j'utiliserais plutôt du drap tissé qui est plus moelleux donc qui donne un meilleur toucher encore. Et vraisemblablement d'ailleurs, je ferais plutôt appel à un facteur pour être sûre mais là cela coûterait plus cher (50 euros environ plus frais de déplacement car il faut mieux avoir l'instrument avec soi pour doser l'épaisseur). Et puis il y a toujours le souci qu'à Amiens même, il n'y a pas de facteur donc ça douille pour faire venir. Appelons cela un dépannage satisfaisant. Bon et sinon, mon Mietke de Kennedy arrive demain. J'aurai donc une caisse de voyage à défaire à la perceuse-dévisseuse et un piètement à monter. J'ai hâte qu'il soit installé (la ronde des clavecins dans l'escalier tournant et la mezzanine étroite me donne des sueurs froides d'avance) et que je puisse le jouer! Je fais tourner en bourrique mes parents avec tout cela, mais la vie de musicien, c'est fait de ce genre d'événements. Bricoler, déménager, voyager, monter sur scène, gérer l'imprévu, le trac l'adrénaline, cela se saurait si c'était une vie de routine.... Voilà, en tout cas, même si cela demande des efforts, j'aime bien ce type de "bricolage", c'est agréable de faire des choses soi-même, de se casser la tête pour trouver des solutions et au final avoir des résultats qui font plaisir. J'avais aussi retapé mon clavicorde avec l'aide de Renée Geoffrion, je ne sais plus si vous vous souvenez. J'aimerais bien pouvoir faire un stage chez un bon facteur de clavecin, pour le réglage, l'harmonisation mais aussi la fabrication de certaines parties, le travail du bois, c'est vraiment un univers qui me plaît. Et pourquoi pas un jour, fabriquer un clavecin avec mes élèves, après tout il y a un atelier au Conservatoire, mais bon là on change de niveau.... Allez, en attendant, repos!
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Bonjour à tous et toutes, Aujourd'hui, on va parler bricolage... En fait, j'aurais dû appeler cet article "Opération épinette, 2e round". Vous allez comprendre. Une de mes petites élèves a récupéré en septembre une épinette d'un particulier, location à l'année presque donnée, une bonne affaire à première vue, mais bien sûr il devait y avoir un hic, sinon cela n'aurait pas été drôle, n'est-ce-pas? Cette épinette des années 70 était en effet inutilisée depuis longtemps et équipée de becs en cuir. Or le cuir, en presque 50 ans d'existence, hé bien, cela vieillit, durcit et finit par casser. Autant vous dire que quand on est passée du stade de meuble de remise à instrument de travail, il y a eu quelques soucis. Moi qui était venue en mode tranquille "j'accorde, je change 2-3 becs et zou", me voilà avec une élève dépitée par un instrument injouable du départ (et moi aussi d'ailleurs, j'étais assez dépitée.....) J'ai donc effectué quelques réglages, accordé XXXXXXX fois et il a fallu trouver une solution pour changer ces becs. Hé bien, je vous le dis, les becs en cuir, c'est la galère. Parce qu'un bec en delrin qui casse, vous le retirez, vous en placez un autre, une petite taille histoire que cela sonne comme il faut et c'est reparti. 2 minutes top chrono. Alors que les becs en cuir, ca ressemble à cela: Est-ce que vous voyez le problème? Le bec en cuir n'est pas inséré dans une languette en bois comme un Delrin, par une petite fente insignifiante. Non! Lui, si on veut le retirer (je sais même pas comment cela peut se faire sans casser la languette, étant donné qu'il est collé), cela laisse un trou énorme. Donc comment procéder? Voilà comment j'ai fait (ça, c'était en octobre-novembre) 1°) J'ai arasé le bec en cuir au scalpel jusqu'à obtenir une surface plane dans la continuité de la languette, qui du coup reste complète. 2°) J'ai percé avec un mini-forêt de 1,5 mm le cuir. 3°) Une fois un trou de taille suffisante obtenu, j'ai inséré un bec en Delrin. 4°) J'ai retaillé le nouveau bec à la bonne longueur et bonne épaisseur. 5°) J'ai replacé l'étouffoir à la bonne hauteur par rapport au nouveau bec. Durée de l'opération, au début, heu 20-25' chaque? Ensuite 10-15'. Sauf que le matériel je ne l'avais pas, du coup je devais courir à l'atelier du Conservatoire puis retourner au domicile de la choupinette, ce qui me faisait également perdre beaucoup de temps. J'en ai fait 4-5 comme cela. J'ai dû également changer 4 languettes qui étaient cassées. Pour cela, j'ai inséré une pointe de trombone (ou une aiguille, selon la taille du trou, c'était un peu anarchique) dans le trou que vous voyez sur le côté du sautereau ci-dessus, de manière à faire sortir la petite tige en métal qui retient la languette. Ensuite, j'ai mis la nouvelle languette (qui était trop large, alors que j'avais demandé le même modèle, du coup j'ai dû passer une dizaine de minutes à poncer au papier de verre), remis la tige en place. Puis inséré et taillé un bec. Certains becs étaient faiblards mais pas cassés (la belle époque), du coup j'ai joué sur la petite vis à l'arrière de la languette qui permet de basculer un peu plus un peu moins la languette . Et voilà, en novembre, après une petite dizaine d'heures de boulot, l'épinette marchait. Fin de l'histoire. Happy end. Hé noooon!!! C'est comme au cinéma, il y a toujours une suite. Récemment, petit texto: " l'épinette n'est plus jouable, il y a beaucoup de notes qui ne marchent plus, au secours" (résumé, mais réaliste). Alors là, comment dire: D'une je ne voulais pas passer tous mes mercredis matins pendant 4 mois à régler le problème. Donc qui c'est qui a pris l'épinette en garderie? c'est Bibi. De deux, après vérification par pression de doigt, sur les becs qui n'avaient pas été changés, ce n'est pas 4 ou 6 ou 10 becs en fin de vie que j'ai trouvé, mais 28! Soit 90% de ce qui restait, quoi. Quelques rescapés. Je n'ai pas encore statué définitivement sur leur sort, pour l'instant ils me servent de référence sonore. Donc qu'est-ce que j'ai fait? Hé bien, la procédure ci-dessus. Sauf que là, j'ai investi dans du matériel pour être tranquille à la maison. J'ai donc acheté une mini-perceuse à main avec 10 forêts de 0,6 mm à 2mm. Prix: 10 euros. On m'a également prêté une perceuse électrique de précision. J'ai alterné entre l'une et l'autre, la perceuse à main pour commencer à initier le trou, l'électrique pour continuer voire finir, mais de temps en temps, j'étais obligée de finir à la main car la languette me paraissait un peu fragile. J'ai utilisé également le scalpel pour agrandir un peu le trou en largeur, parce qu'un forêt fait un trou rond, et que le Delrin a une base rectangulaire (et pour tous ceux qui ont joué quand ils étaient petits, les rectangles dans les ronds, cela ne marche pas tout à fait!) Voici donc le matériel: Ensuite, une fois les trous faits, j'ai découpé un à un chaque bec dans une plaque de Delrin et je les ai rentrés dans leur trou. Voici donc les sautereaux rééquipés: Durée du travail : 3h. Maintenant il faut que j'attende d'être de retour à Amiens pour pouvoir procéder à la suite, à savoir taille des becs, réglages des étouffoirs, des vis de languette.
Ho, il doit y en avoir pour encore 3h....enfin, j'espère!!! et puis un petit accord. ou deux. Je suis sûre qu'un facteur ferait plus rapidement et plus précis, mais en attendant je fais au mieux. Je montre donc juste ce que je fais, sans vouloir donner quelque exemple que ce soit. Voilà. La suite au prochain épisode. Le mot de la fin? Si ma petite élève ne bosse pas après tous ces efforts, je la passe à la moulinette et j'en fais du compost. La voilà prévenue.
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