J'espère avoir réussi à montrer au fil de ce blog que le clavecin n'est pas ce vieil instrument poussiéreux tout droit sorti du grenier de mamie et dont il faudrait jouer accompagné de la panoplie bougies-perruque poudrée, mais que c'est un instrument qui a sa place aujourd'hui et qu'il y a une génération de jeunes clavecinistes fringants et résolument modernes qui en jouent.
J'ai passé l'âge d'ailleurs de prétendre que je jouais du piano, comme je l'ai fait jusqu'à mes 18 ans pour éviter d'avoir à expliquer ce que c'était ou de subir les réflexions du type "ah le vieux piano?" ou "Mais comment tu en es venue au clavecin, c'est quand même pas commun! ". Maintenant j'assume et au final le regard des gens est généralement plutôt positif. Est-ce lié ou est-ce justement le travail de vulgarisation mené par les clavecinistes durant les 50 dernières années qui porte ses fruits ? Je ne saurais dire... Bref, on n'est pas là pour parler de moi: je suis sûre que beaucoup d'entre vous ne connaissent pas encore toute la diversité des styles dans lesquels le clavecin a été employé aux XXe et XXie siècles. Moi-même j'en découvre encore! Alors attention, entendons-nous bien, il ne s'agit pas toujours de clavecin comme on le voit plus fréquemment aujourd'hui, à savoir une copie d'ancien, il y a des clavecins modernes avec ou sans pédales et même des sons synthétisés. Mais on peut imaginer souvent arranger ces versions pour clavecin copie d'ancien. Il y a un site que j'aime bien, www.martial-morand-clavecin.fr où l'on trouve dans un article intitulé "Jazz, pop, rock" quelques exemples. Quand je mets MM entre parenthèses, c'est aux exemples de son site que je vous renvoie. Alors allons-y: Le JAZZ/RAGTIME : Don Angle ( Harpsichord magic, sur youtube), Rosemary Clooney (MM), le Baroque jazz trio (Zoma, sur youtube) La CHANSON FRANÇAISE: Charles Trénet (Les enfants s'ennuient le dimanche, MM), Edith Piaf (Johnny, tu n'es pas un ange, MM), Sylvie Vartan (Ballade pour un sourire, MM), Polnareff (L'amour avec toi, MM), Brigitte Bardot (Je reviens toujours vers toi, MM) La musique POP/ROCK : La liste est très longue!! Beatles, Rolling stones, Deep purple, the Beach Boys, et tant d'autres! Voir une proposition de liste sur le site rock6070.com , post CLAVECIN de leur forum. Plus récents: Jamiroquai, King for a day 1997 (MM) Bjork ,Unravel , Venus as a boy (sur youtube) Emilie Autumn, Girls just want have fun (sur youtube) Riders on the Storm and Spanish caravan-the Doors covers (youtube) Julie Holter, Feel you 2015 (MM) La MUSIQUE CELTIQUE: Suite vannetaise de Yves Ribis ou Arrangements de gigues écossaises d'Alan Stivell, interprétés par Claude Nadeau (youtube) Le TANGO : "Tango Pedestre" ou "Milonga de Junio" pour guitare et clavecin -Maximo Diego Pujol (youtube) Milonga de Cardoso, duo Polycordes (youtube). Le FLAMENCO: Disque "Flamenco Barrocco" par Marc Loopuyt, Catherine Latzarus et Laura Clemente (disponible sur spotify) La musique d'inspiration ORIENTALE: Jasmin Toccata par Keyvan Chemirani, Jean Rondeau, Thomas Dunford. Et un petit ovni que je ne peux classer: le groupe Supersonus avec clavecin, nyckelharpa, chant diphonique, kannel et jew's harp! Ritus sur youtube. Bon, voilà pour le moment de quoi diversifier vos playlists, bonne écoute!!
1 Commentaire
Petite réflexion du jour sur le travail à la maison chez les apprentis clavecinistes....
Quand on est enseignant, on se rend vite compte que le travail à la maison revêt une importance capitale pour les progrès de l’élève. La qualité de la pédagogie, les conseils donnés, le choix des morceaux et des exercices techniques sont évidemment importants, mais si dans l’intervalle entre les cours, les choses ne sont pas faites comme il faut, cela ne suffira pas à compenser. Par expérience, on peut répartir les élèves en plusieurs groupes, sachant que cette répartition correspond à une tendance générale et pas au constat sur une séance (on a tous des jours avec, et des jours sans, des semaines tranquilles ou infernales!) Groupe 1 : Ceux qui ne travaillent pas du tout ou pas assez (15’ tous les 3 -4 jours ou 1h d’un coup le week end) et arrivent avec des morceaux non sus ou pas en place. Groupe 2 : Ceux qui ne travaillent pas ou peu, mais qui grâce à leurs facilités y arrivent, mais ne progresseront jamais comme ils le pourraient. Groupe 3 : Ceux qui travaillent régulièrement et efficacement et qui progressent autant qu’ils le peuvent, d’un peu à super vite (au point parfois que le professeur se dit qu’il va devoir retourner fissa fissa à son clavier s’il veut tenir la route jusqu'en perfectionnement ;) ) Groupe 4 : Ceux qui travaillent autant voire plus que le groupe 3 et ne progressent pas ou peu.. ANALYSE: Pour le groupe 1 : C’est une situation assez décourageante pour le professeur, MAIS..... Dans de nombreux cas, la motivation de l’élève est en cause, donc le professeur a sa part de responsabilité. A lui d’à la fois:
Si rien n’y fait et que l’enfant n’accroche pas ou ne veut pas se mettre à l’instrument à la maison, il faut mieux
Pour le groupe 2 : Dommage pour eux de ne pas exploiter leur potentiel. Un bon professeur n’est pas dupe, d’ailleurs, il fait bien la différence entre ce qu’on peut faire et ce qu’on fait et entre un travail bâclé et un travail sérieux.. Mettre l’élève dans une situation où il doit jouer en public un morceau au maximum de son niveau ou le faire jouer en musique d’ensemble avec des musiciens de niveau plus avancé peut être un moyen de pallier ce défaut. Sinon, appliquer la méthode du groupe 1 et chercher à susciter la motivation. Enfin : remettre les pendules à l’heure. Certains élèves croient faire des étincelles et s’en contentent ou encore ont tellement peu confiance en eux qu’ils ne pensent pas pouvoir faire mieux. Pour le groupe 3 : Bravo à eux, et peu importe quel niveau ils atteindront au final, l’essentiel est qu’ils aillent de l’avant et à leur maximum. Il y a des professeurs qui jugeront que seuls les meilleurs sont dignes d’intérêt, mais en ce qui me concerne, j’ai toujours plaisir à faire travailler un élève qui bosse et progresse. Et pour le groupe 4 : là c’est décourageant pour tout le monde ! Mais ce n’est pas une FATALITE ! Soyons clairs : des heures passées à l’instrument, et pas de résultats ? Ce n’est pas normal et il faut chercher une solution. Je ne dis pas que les résultats doivent être immédiats, la pratique de la musique apprend vite la patience. C’est parfois au bout d’une semaine de travail ou plus qu’un trait passe, qu’un geste est acquis, qu’un réflexe s’automatise. Il y a des paliers où la progression stagne, c’est normal dans un apprentissage. Et il faut aussi ne pas se décourager les jours où rien ne va comme vous voulez. La musique étant une activité intellectuelle dense demandant énormément de concentration, si vous êtes fatigués ou préoccupés, ne vous acharnez pas, prenez une pause, chantez ou écoutez une bonne version de votre morceau à la place. Ces constats faits, si vous passez des heures à l’instrument et que vos progrès sont quasi inexistants, que vous passez des mois pour mettre en place un morceau de 2 lignes, réagissez, il y a un problème de METHODE de travail. Je tiens donc à rappeler que travailler n’est pas jouer, dans le sens où jouer votre morceau en boucle en vous disant qu’au bout de 300 fois ca va bien finir par marcher ne sert à rien. Mis à part à vous décourager. Vous pouvez faire de temps à autre une séance à la cool pour rejouer des morceaux connus sans trop cogiter, mais pour le reste, méthode, patience et concentration sont ESSENTIELS. Et qu’on ne me dise pas, ah oui, mais si on pense juste travail, il est où le plaisir ? Mon avis est que le plaisir vient avec la réussite et que la réussite vient du travail. Je n’irais pas jusqu’à dire que du coup le plaisir vient du travail, ce serait un peu trop sophiste et un peu trop « made in campagne présidentielle » par contre. Bref. Le débat est ouvert. Voici mes conseils pour un travail efficace : Point un : Travaillez dans de bonnes conditions Premièrement : Pas de bruit autour, pas de repas sur le feu à surveiller toutes les 3 minutes, pas de téléphone à côté. Choisissez un moment où vous êtes au calme et en forme. Deuxièmement : Scindez votre temps de travail en fragment de 15’- 20’ séparés par une pause de 5’ (pendant cette pause, levez- vous, bougez, étirez-vous, allez boire, bref oxygénez le cerveau ). Point deux : Passez par différentes étapes et soignez chacune d’elle. Premièrement : Mettez des numéros de mesure. Découpez votre morceau de manière logique (= par phrases musicales). Repérez les passages qui vous semblent comporter des difficultés et entourez-les. Deuxièmement : Choisissez une phrase musicale (la première par exemple, mais cela peut être également une phrase qui va se répéter, ou une qui vous semble particulièrement compliquée): 1) Phase de préparation - Chantez chaque main en vous concentrant d’abord sur la précision et la fluidité du rythme et des notes (on s’en fiche que vous chantiez bien ou pas !), puis en cherchant une interprétation musicale (avec des directions, la bonne énergie, le caractère, les nuances) 2) Les mains séparées - Jouez les mains séparées à un tempo lent d’abord puis augmentez-le jusqu’à atteindre un tempo supérieur à celui que vous aurez au final mains ensemble. Ne jouez pas mécaniquement, gardez en tête les intentions musicales que vous aviez en chantant. Le rythme ne doit jamais être affecté. Ne laissez passer ni imprécisions, ni hésitations Attention: dans certains morceaux, les mains ne sont pas séparables car cela ne ferait aucun sens exemple d'un morceau en style luthé). 2) Les mains ensemble - Travaillez cette phrase (enchaînée toujours avec la première note de la mesure suivante) mains ensemble maintenant. Pas trop vite au début, pour pouvoir garder exacts les rythmes. Puis allez jusqu’au tempo voulu par la musique. Il faut mieux savoir bien (c’est à dire sans hésitations, erreurs et avec musicalité) une phrase du morceau que vouloir tout jouer, mais imparfaitement. - Faites cela pour tout le morceau. Chaque enchaînement d’une phrase à l’autre doit être travaillé particulièrement. Point trois : Concentrez-vous sur les passages difficiles Pour chaque phrase après les premières étapes, vous devez avoir repéré les passages difficiles. Faites-en une liste grâce aux numéros de mesure. Ciblez les. Travaillez-les beaucoup plus que le reste. Soyez inventifs : s’il s’agit d’un problème de coordination (mouvement contraire, rythmes différents, articulation différente), inventez un exercice demandant ce type de coordination ; s’il s’agit d’un problème technique, cherchez ou inventez des exercices ciblant cette difficulté technique. N’hésitez pas à reprendre une des étapes précédentes. Point quatre : Terminez par une étape de vérification A la fin de votre séance de travail, refaites une fois très lentement et sans aucune erreur tout ce que vous avez travaillé, laissez reposer et commencez par cette phrase ou ces phrases la fois suivante pour vérifier ce qui est resté en mémoire. A ne pas faire : - Ne pas regarder la partition. Il faut LIRE. Contrôler ce que vous avez à faire, et avec quel doigt, et quelle articulation, et apprendre à garder le fil de la lecture tout en jouant. Vous viendrait-il à l’esprit de lire une poésie juste une fois et d’essayer chaque jour de la réciter en fonctionnant sur la mémoire du premier jour ? Non, vous auriez besoin de revenir au texte pour consolider la mémoire et ne pas vous tromper, ben là pareil. - Ne pas respecter les doigtés choisis. Si vous changez de doigtés comme de chemise, comment voulez-vous que la main mémorise le bon mouvement ? - Jouer de manière mécanique. Plus vous allez vous concentrer sur la MUSICALITE, plus vous arriverez à surmonter les difficultés techniques. Car c’est l’intention musicale juste qui suscite le bon geste, et le bon geste qui facilite le jeu. Voilà, bon travail ! Vos retours et expériences sont comme d’habitude les bienvenus ! |
A proposParce que j'ai toujours aimé écrire. Et partager ma passion de la musique..... Categories
Tous
|