Suite au commentaire d'un lecteur, j'aborde le sujet des doigtés. Pourquoi est-ce un sujet important ? Pourquoi un François Couperin a-t-il consacré plusieurs paragraphes de son Art de toucher le clavecin à aborder ce sujet et à proposer des doigtés pour certaines de ses pièces? Je crois que presque tous les musiciens ont entendu au moins une fois dans leur vie de la bouche de leur professeur adoré : - "Si tu mettais le doigté écrit, tu ne te tromperais pas" - "mais enfin, à quoi cela sert que je passe 1h à te mettre des doigtés sur la partition si c'est pour que tu ne les fasses pas?" Et, enfin parce que tout professeur a ses paradoxes: - " Arrête de regarder seulement les doigtés et lis un peu tes notes". Les doigtés sont des repères. Ils sont censés faciliter la vie de l'exécutant en minimisant ses déplacements et en plaçant sa main dans la position la plus confortable et la plus efficace. Les élèves qui changent tout le temps de doigtés, qui font des choses acrobatiques (passer l'index au dessus du majeur, jouer toute une gamme avec 1 doigt ou jouer avec pouce puis auriculaire deux notes consécutives, entre autres) se compliquent la vie -et devraient être fouettés en place publique. C'est pour cela que les professeurs en général proposent des doigtés et s'obstinent à les faire respecter. Mais, quelques remarques: 1) Nous ne sommes pas des clones. J'ai une main de taille moyenne avec des doigts fins. Un doigté qui me va bien n'ira pas forcément à quelqu'un avec une très grande main ou des doigts plus larges. Quand vous vous trouvez face à une édition avec des doigtés déjà écrits, vous ne savez pas qui les a proposés et comment était la morphologie de sa main. Donc il faut avoir un esprit critique, si vous sentez que cela ne va pas, testez autre chose ou demandez une autre solution au professeur. Un doigté doit aider, pas constituer une difficulté supplémentaire. 2) Les doigtés ne remplacent pas la lecture des notes. Combien d'élèves lisent 1-2 et jouent la note d'à coté alors qu'il fallait faire une tierce en écartant les doigts? Il faut s'entraîner à saisir visuellement à la fois la note et son doigté, de manière à ne pas se tromper. 3) Les doigtés sont plus que des doigtés. Ils induisent une articulation, un toucher, des appuis. Si un doigté vous oblige à couper la ligne musicale à un mauvais endroit, changez-le. L'on joue différemment avec le pouce (très pratique mais gauche et lourd) qu'avec les 2e et 3e doigts (fermes et agiles) ou le 4-5 (expressifs mais plus faibles), c'est aussi un paramètre à prendre en compte. Leur choix ne doit donc pas être que pratique, il doit être aussi musical. Aussi je vous conseille de tester différentes possibilités et de choisir la meilleure par rapport à ces deux paramètres: pratique et esthétique. 4) Enfin, on ne peut parler musique ancienne sans aborder le sujet des doigtés anciens. Aujourd'hui, l'on emploie le pouce à l'égal des autres doigts, on le met sur les feintes (dièses, bémols), on utilise le passage du pouce pour les gammes (exemple en do: 12312345 / 54321321). Ce n'a pas été toujours le cas et les facons de doigter ont beaucoup différé selon l'époque et le pays. Il est intéressant de travailler les morceaux en respectant les conventions de l'époque, car comme je disais plus haut, le doigté conditionne l'articulation et la ligne musicale. Aussi je vous conseille la lecture de l'article ci-dessous, "Pour un historique des doigtés anciens", par Dominique FERRAN, qui traite en détails du sujet:
1 Commentaire
claire
3/25/2015 07:26:00 am
très intéressant, comme toujours !
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A proposParce que j'ai toujours aimé écrire. Et partager ma passion de la musique..... Categories
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